Tireur/Filtreur

Bonjour,

Je parle habituellement de prise de vue et d'appareils photographiques.

Cette fois, c'est de tirage que je veux parler.
Tirage, c'est le mot savant pour parler des photos tirée sur papier.
Je parle donc des photos issues d'un tirage et non pas imprimées avec une imprimante...
Vous savez, c'est ce que l'on avait avant le numérique et qui remplissent les albums des armoires.
L'avantage : Elles ne craignent pas les pannes de disque dur... (j'y reviendrai).

Voilà bien, bien longtemps, dans une trés lointaine galaxie, j'étais tireur filtreur...
Ca veux dire quoi ??
Et bien , c'est simple, j'étais  la personne qui, à l'aide d'un agrandisseur, produisait un tirage photo en couleur.

Comment cela marche-t-il ? Ou plutot "marchait-il", même si ce métier existe encore un peu. Qu'est ce qu'un agrandisseur ??

C'est simple, un agrandisseur couleur est basé sur le même principe qu'un agrandisseur noir&blanc.
Pour les plus numérisés d'entres-vous, expliquons la version N&B d'abord.

L'agrandisseur est constitué d'un plateau, d'une colonne vissée sur celui-ci, supportant une "tête".
Cette tête contient un dispositif d'éclairage, qui éclaire le négatif (ou la diapositive - positif - ) par transparence, sur le plateau. Un peu à la manière d'un projecteur de diapositive (oubliez powerpoint, cela n'a rien à voir).

L'agrandisseur couleur a lui, une "tête" couleur, greffée sur la tête "de base" et sur la colonne. Cette tête est qualifiée de couleur, car, sur le trajet du rayon lumineux, un jeu de trois filtres de couleur peut être inséré, de manière variable, et modifier ainsi la "couleur" de la lumière.
Ces trois filtres sont de couleur Jaune, Magenta et Cyan. Nous y reviendrons.


Voilà planté le décor. J'étais donc tireur-filtreur chez Central-Color, un laboratoire professionnel, qui existe encore, Rue Pergolèse, à  Paris.

Débarqué du service militaire, je rejoins "Central", en novembre 1984...

Je me suis retrouvé dés le premier jour, dans mon, box noir (environ 3x3 m), devant un monstrueux Durst Laborator 1000, équipé d'une tête CLS450...
Cette tête, était donc équipée des ces trois filtres, positionnables à l'aide de boutons rotatifs, selon une gamme allant de 0 à 130 points.
Cet agrandisseur était capable de tirer à partir de film du format 110 au 4x5 inches, en passant par tous les intermédiaires. De la belle machine.



Le travail se déroulait comme suit :

- Récupération d'une pochette plastique transparente contenant le bon de commande du client, précisant le nombre d'exemplaire, le format, la finition (satinée, brillante), ainsi que le ou les négatifs ou positifs.
(Mes premiers tirages furent uniquement faits à partir de négatifs, plus faciles à tirer),

- Réalisation d'une bande test. Une bande de papier de 5-10 cm de large et 30 cm de long est posée en travers du plateau et exposé selon un temps de pose et un filtrage estimé,

- Développement de la bande test,

- Examen de la bande test, déduction des corrections à apporter,

- Réalisation d'une autre bande test, ou, si la première est trés proche d'un bon tirage, réalisation du tirage "def",

- Examen et acceptation (ou rejet) des tirages par une équipe de femmes, formées à juger les tirages, (elles devaient être 3 ou 4, de mémoire, pour 6/8 tireurs/tireuses),

- Mise en pochette pour retour au comptoir.

Pour avoir une idée, en 1984, un tirage 10x15 était facturé 110 Frs au client, soit 15 euros d'aujourd'hui.
En monnaie constante, cela représenterait 30 €, selon l'INSEE !!


Il faut bien comprendre que le filtrage/temps de pose estimé dont je parle dépend de beaucoup de facteurs, dont :

- Le lot de papier (un numéro de lot est inscrit sur chaque boite, avec un filtrage de base indicatif),
- L'age de la lampe de l'agrandisseur,
- La dominante du négatif ou du positif,
- Et surtout, l'acuité et la maitrise du tireur à déterminer la dominante.
La qualité des bains n'influait pas, Central ayant une gestion de cette qualité "aux petits oignons", avec une régénération continue.

Pour préciser, la dominante est la teinte du tirage qui l'éloigne d'un tirage "neutre".
C'est à dire d'un tirage où les blancs sont blancs...
La balance des blancs, mais pas automatique ...

Une fois le filtrage de base connu pour une boite de papier, seul, l'oeil du tireur était à même de déterminer la correction à apporter à cette base pour aboutir à un bon tirage, en regardant simplement l'image sur le plateau .

C'est au bout de six mois, que mes yeux sont devenus assez "pointus" pour tirer aprés une seule bande test...
Ensuite, pendant des années et des années, les tirages "dominés" me sautaient aux yeux !
J'ai un peu perdu de cette capacité (avec quelques dixièmes aussi ).

La suite, bientôt... Ainsi que l'explication du titre.

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